Je
ne suis pas un pauvre. Ni un menteur. Je n’ai pas toujours eu peur.
Il m’arrive d’avoir des érections métalliques. Je n’entretiens
aucun rapport humain. Je ne me connais pas d’ennemi. Parfois, je me
révolte. Là, je me sens seul. Je mets ma vérité en jeu. C’est
obscène. Je n’envie pas les artistes. L’art ne peut plus rien
pour moi. Et plus que tout, les rapports intimes m’emmerdent. Je
veux la richesse du monde, toute la richesse du monde. Je ne crois ni
en l’art, ni en l’amour, ni en la révolution. Je veux voir,
sentir, toucher ce que en quoi, je crois. Ils ne nous ont pas donné
grand-chose. Ils auraient mieux fait de ne rien nous donner du tout.
Je crève ! J’en ai marre de toujours chercher refuge dans un
pauvre irrationnel dénué de toute invention, absolument sans
imagination. Car en plus de toute cette misère, je suis aussi dénué
d’imagination. Je baise, je bois, je mange, je dors. Et après ?
De temps en temps, quelqu’un me conseille de changer de misère,
d’abandonner ma misère partielle au profit d’un servage total.
Mais ceux qui osent me conseiller ainsi, savent-ils que j’ai les
yeux grands ouverts et que je les vois, eux. Quelles pitreries
veulent-ils donc que je fasse pour que rien d’essentiel ne change
dans ma vie ? Excusez-moi mais à vos chaînes… de
télévisions, je continue à préférer mes rêves débiles et me
saouler la gueule et faire des grimaces quand vous avez le dos
tourné.
Yves Tenret
Yves Tenret