Il
n’est pas Celte du tout, et encore moins Flamand. C’est un
Normand, un grand dadais de guerrier blond qui veut se mêler de
penser alors que la seule chose qu’il aime, c’est cogner !
Il
est nostalgique d’une forme étriquée de civilisation bourgeoise
dans laquelle il s’épanouissait en toute sécurité. Mais le
sait-il ? Honnête et grave, il représente les vertus
provinciales et la bourgeoisie conservatrice. C’est le Sully
Prud’homme de l’ultra-gauche, l’homme du bon
sens. Il voit le monde à travers le
Droit ; au fond de lui, il aime l’ordre, la raison, la logique
pénale, le contrat que l’on respecte, l’idéologie juridique.
En
même temps, ce lunatique est un quinteux, difficile à gouverner, en
révolte contre l’autorité quelle qu’elle soit, rouspéteur qui
parle tout seul, anarchique, tout en saccades, un révolutionnaire en
peau de lapin, victime de son orgueil et jeté dans une querelle sans
fin avec le monde. Les mots sont sa seule religion. Il ne peut rien
traduire de non abstrait, de naissant, de germant, de changeant ; il
ne comprend ni la cause, ni le mouvement, ni la force, ni le devenir.
L’artificiel et le conventionnel lui suffisent.
Comment
quelqu’un qui a une culture 100% livresque pourrait-il comprendre
que l’échange est liberté et l’usage, contrainte. Il a des
œillères parce que le contact direct avec ses semblables lui
manque. Mais Machin a écrit. Mais Truc a dit. Fada des dicos, il
prend le mot pour la chose, l’étiquette pour le contenu.
Il
trouve clair l’incompréhensible et abhorre ce qui est profond.
Féru de politique, c’est moins une intelligence qu’un
tempérament ; peu commode, illogique, incohérent, têtu,
boudeur, étriqué, anti ceci et anti cela. La pensée reste chez lui
hachée, fragmentaire, respirant mal. C’est un adepte des jugements
abrupts, des généralisations hâtives, toujours sans nuances, un as
des fausses symétries et des oppositions artificielles. Chez ce
matamore pompeux et guindé, l’action n’est que motif à
discourir. Il recherche l’effet, n’a qu’une idée et la délaie
avec une insupportable prolixité ; il se vautre dans le fatras
prétentieux de l’empirisme le plus vulgaire, pataugeant dans sa
théodicée chimérique.
Handicapé
de l’empathie, que peut-il comprendre ? Tendu, anguleux et
cassant, totalement inapte à l’échange, à la conversation.
Autrui lui est interdit parce qu’on ne peut pas intégrer autrui à
des activités compulsives. Ce que ses filets lui ramènent, ce sont
encore et toujours des esclaves. Et il conceptualise en partant de là
sa pauvre petite existence. Il n’aime pas les gens, le peuple qu’il
prétend défendre (il le hait, le méprise, en a honte et peur). Il
n’aime personne et prétend œuvrer pour le bien de tous. Il n’aime
pas la vie ; pour lui, c’est une maladie dont il faut guérir.
Est-ce
cela qui en fait le grand humoriste qu’il est ? Un vrai bon
petit Swift ! Spirituel mais être superficiel, à la pensée
courte, sans profondeur. Pétrifié dans ses abstractions, il ne
pénètre jamais dans le sanctuaire intime de la vie, reste en dehors
des choses et même sans doute en dehors de lui-même. Il manque de
fantaisie, d’audace, d’élan, confond provocation et pertinence.
Il est d’une inculture qui s’ignore, d’une superficialité
positiviste, sans aucune profondeur dans les développements
éthiques. Son critérium est la richesse matérielle et non la
beauté éthique.
Vert-de-gris,
sent le laboratoire, grince comme une poulie, est mécanique,
chimique et technologique. Il se déclare contre la part animal de
l’homme parce que de cette part, il ne sait qu’en faire. Cet
anti-utilitariste crache sur tout ce qui est réellement beau. Anti
naturel, rigoureux, sec, âpre, ne possède ni sérénité, ni
charme, ni humanité, ni noblesse, ni grâce, ni goût. C’est un
laborieux ! Ce grand crétin prend l’apparence pour la chose,
la forme pour la substance, la loi pour l’essence. Il met le mal
hors de l’homme ! Faiseur, hâbleur médiocre et violent, il
pratique un charlatanisme tapageur.
Il
répugne fortement à ce qui est obscur, aux énigmes, aux extases,
au mysticisme, aux puissances ténébreuses, aux côtés nocturnes de
la conscience, aux mystères, aux rêves, bref, à tout ce qui fait
le charme de nos vies.