mercredi 18 mars 2015

Quand j'étais zoophile





Déjà en ce temps-là je me sens mal avec la plupart des gens
Même avec les chiens et encore plus avec les chats
J’ai douze ans et je croupis dans mon enfance
Renvoyé de tôle en tôle
Je suis à Berchem-Sainte-Agathe,
Dans la ville des sept baraques à frites
Englué dans tout ce folklore graisseux
Si ardent, si morveux, si plein de moi-même ;
Je me roule dans l’herbe du baptistère
Ravi de mon propre vertige
Un moment libre et ne savoir que faire
C’est alors que l’animal s’approche de moi
Je le serre dans mes bras
Fasciné par la course des nuages
C’est un mâle aux oreilles taillées en pointes et à la coupe sophistiquée
Il se frotte frénétiquement contre ma jambe
Dégoûté, je le repousse violemment
Il ne revient pas à la charge, il se contente de gémir
Je flanche, le rappelle, lui empoigne le membre, m’essuie dans l’herbe
J’ai faim, j’ai oublié d’emmener mon bouquin,
Je tourne en rond dans ce jour de solitude épaisse.



                                                                              Yves Tenret